Sujet du café-philo 24 septembre
Sujet du café philo
Les lois peuvent-elle faire notre bonheur ?
sujet du bac de philo 2019
Quand : Mardi 24 septembre 12h30
Où : Molly Malone’s
Qui peut venir ? : tout le monde
Pour vous préparer,
Quelques liens
Cours sur la loi et la désobéissance : http://coursphilosophie.free.fr/cours/desobeissance.php
Cours sur la loi : la loi est-elle un obstacle à ma liberté ?
Quelques textes
Les lois
On a beau vouloir confondre lʼindépendance & la liberté. Ces deux choses sont si différentes que même elles sʼexcluent mutuellement. Quand chacun fait ce quʼil lui plaît, on fait souvent ce qui déplaît à dʼautres, & cela ne sʼappelle pas un état libre. La liberté consiste moins à faire sa volonté quʼà nʼêtre pas soumis à celle dʼautrui; elle consiste encore à ne pas soumettre la volonté dʼautrui à la nôtre. Quiconque est maître, ne peut être libre; & régner, cʼest obéir. Vos Magistrats savent cela mieux que personne: eux qui comme Othon nʼomettent rien de servile pour commander. Je ne connois de volonté vraiment libre que celle à laquelle nul nʼa droit dʼopposer de la résistance; dans la liberté commune, nul nʼa droit de faire ce que la liberté dʼun autre lui interdit, & la vraie liberté nʼest jamais destructive dʼelle-même. Ainsi la liberté sans la justice est une véritable contradiction; car, comme quʼon sʼy prenne, tout gêne dans lʼexécution dʼune volonté désordonnée.
Il nʼy a donc point de liberté sans Loix, ni où quelquʼun est au-dessus des Loix: dans lʼétat même de nature lʼhomme nʼest libre quʼà la faveur de la Loi naturelle qui commande à tous. Un peuple libre obéit, mais il ne sert pas; il a des chefs, & non pas des maîtres; il obéit aux Loix, mais il nʼobéit quʼaux Loix, & cʼest par la force des Loix quʼil nʼobéit pas aux hommes. Toutes les barrières quʼon donne dans les Républiques au pouvoir des Magistrats, ne sont établies que pour garantir de leurs atteintes lʼenceinte sacrée des Loix: ils en sont les Ministres, non les arbitres; ils doivent les garder, non les enfreindre. Un peuple est libre, quelque forme quʼait son Gouvernement, quand, dans celui qui le gouverne, il ne voit point lʼhomme, mais lʼorgane de la Loi. En un mot, la liberté suit toujours le sort des Loix, elle règne ou périt avec elles; je ne sache rien de plus certain.
Rousseau Lettres écrites de la montagne
Lettres en entier : https://www.rousseauonline.ch/pdf/rousseauonline-0028.pdf
Le bonheur
Comment se fait-il que les articles de foi fondamentaux, en psychologie, sont tous la pire déformation et le plus odieux faux monnayage ? « L’homme aspire au bonheur », par exemple – qu’est-ce qui est vrai là-dedans ? Pour comprendre ce que c’est que la vie, quelle sorte d’aspiration et de tension exige la vie, la formule doit s’appliquer aussi bien à l’arbre et à la plante qu’à l’animal. « A quoi aspire la plante ? » – Mais là nous avons déjà imaginé une fausse unité qui n’existe pas. Le fait d’une croissance multiple, avec des initiatives propres et demi-propres, disparaît et est nié si nous supposons d’abord une unité grossière, « la plante ». Ce qui est visible avant tout, c’est que ces derniers « individus », infiniment petits, ne sont pas intelligibles dans le sens d’un « individu » métaphysique et d’un « atome », et que leur sphère de puissance se déplace sans cesse ; mais chacun de ces individus, s’il se transforme de la sorte, aspire-t-il au bonheur ? – Cependant toute tendance à s’étendre, toute incorporation, toute croissance, est une lutte contre quelque chose qui est accompagnée de sensations de déplaisir : ce qui est ici le motif agissant veut certainement autre chose en voulant le déplaisir et en le recherchant sans cesse. – Pourquoi les arbres d’une forêt vierge luttent-ils entre eux ? Pour le « bonheur » ? – Pour la puissance !… L’homme devenu maître des forces de la nature, l’homme devenu maître de sa propre sauvagerie et de ses instincts déchaînés (les désirs ont appris à obéir, à être utiles) – l’homme comparé à un pré-homme représente une énorme quantité de puissance – et non pas une augmentation de « bonheur ». Comment peut-on prétendre qu’il a aspiré au bonheur ?…
Nietzsche, La Volonté de puissance
Le concept du bonheur est un concept si indéterminé, que, malgré le désir qu’a tout homme d’arriver à être heureux, personne ne peut jamais dire en termes précis et cohérents ce que véritablement il désire et il veut. […] Pour l’idée du bonheur un tout absolu, un maximum de bien-être dans mon état présent et dans toute ma condition future, est nécessaire. Or il est impossible qu’un être fini, si perspicace et en même temps si puissant qu’on le suppose, se fasse un concept déterminé de ce qu’il veut ici véritablement. Veut-il la richesse ? Que de soucis, que d’envie, que de pièces ne peut-il pas par là attirer sur sa tête ! Veut-il beaucoup de connaissance et de lumières ? Peut-être cela ne fera-t-il que lui donner un regard plus pénétrant pour lui représenter d’une manière d’autant plus terrible les maux qui jusqu’à présent se dérobent encore à sa vue. […] Bref, il est incapable de déterminer avec une entière certitude d’après quelque principe ce qui le rendrait véritablement heureux : pour cela il lui faudrait l’omniscience. […] Le problème qui consiste à déterminer d’une façon sûre et générale quelle action peut favoriser le bonheur d’un être raisonnable est un problème tout à fait insoluble.
Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs
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